5. Anatomie d’une affiche
Une affiche, on l’a dit, doit être préparée, pensée et réalisée fréquemment avant même que le film soit tourné. Outre les références inhérentes à leurs créateurs et le genre dans lequel s’inscrit le film, trois éléments de base viennent composer l’affiche de film :
le(s) personnage(s) (ce qui ne signifie pas forcément les acteurs les incarnant)
l’image emblématique
le slogan ou accroche
Dans le cas d’une suite, logo et charte
graphique viendront rejoindre ces 3 éléments, déjà prédéfinis dans le premier opus de la série. L’affiche demeure un concentré des atouts du film… sans ses défauts !
Le monde de la publicité évolue à l’instar de notre manière de voir et de représenter notre quotidien ; on peut assez facilement, dans une affiche de cinéma, repérer de quelle décennie elle provient et quel est le genre filmique illustré, le fait de connaître ou pas les acteurs et le film n’y étant finalement pas pour grand-chose. C’est tout simplement affirmer que l’anatomie de l’affiche s’est considérablement modifiée, sur la base de départ pourtant réduite de 3 éléments récurrents.
Le jeu de piste induit par le parcours des acteurs, la parution de suites plus ou moins directes, la reprise d’un
univers visuel proche ou les
remakes
ont fait jouer une forme de concurrence entre les créations des studios ; mais il a certainement conduit à l’explosion visuelle actuelle, où un même
film peut donner lieu à des campagnes promotionnelles diverses, où chaque personnage va avoir son affiche-effigie (exemple de
Huit femmes
de F.Ozon en 2002) et où chaque thème va trouver son angle d’attaque représenté (exemple de
Shrek
d’A. Adamson en 2001, avec les thématiques de l’humour, de l’amour et de
l’enfance). Le plus difficile reste de créer des affiches assimilables au film, intéressantes esthétiquement et intellectuellement, au-delà des
exigences des acteurs, producteurs et studios.
Le choix de
l’image
dépend beaucoup de la présence ou non d’acteurs de renom dans le film. Ainsi, dans la filmographie de Tom Cruise, à la fois acteur et producteur, peu de place aura été laissé dans sa
filmographie autour des gros plans sur son visage, principal moteur
bankable
de la curiosité du grand public, ce qui n’empêche pas du reste la très grande valeur esthétique de la plupart des affiches de ses
films.
A l’inverse, lorsque les acteurs ne sont pas l’atout médiatique majeur, le visuel réunit les éléments faisant l’attrait
principal du film, en un seul dessin ou image photographique, ou au contraire par l’addition de plusieurs séquences clés, elles aussi proposées soit en dessin soit en photo, le visuel final étant
désormais retouché numériquement. La série des
Taxi
(de G.Pires en 1998 et 2000, de G.Krawczyk en 2003)
est un bon exemple de ce choix fait sur l’ambiance dynamique des films.
Certains films demeurent célèbres pour leur accroche : le « in
space no one can hear you scream »
du
Alien
originel(R.Scott - 1979), ou le « He knows no fear. He knows no danger. He knows nothing. » de
Johnny English
en 2003 (P.Howitt) ont su l’un comme l’autre capté l’essence du film en quelques mots, terrifiants ou parodiques. Parfois, une suite de mots suffit, poussant la compréhension des idées à sa plus
simple expression, qui devient le leitmotiv du récit (c’est la cas du « Jusqu’ici tout va bien » de
La haine
de M.Kassovitz en 1995).
Avec le temps, du reste, l’accroche s’est réduite, alors qu’elle faisait encore plusieurs lignes au milieu des années
1980 et devait plus être considérée comme une introduction à l’univers présenté que comme un slogan au sens actuel du mot.