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5 avril 2008 6 05 /04 /avril /2008 15:48
Chapitre 8 - Lecture d'affiches thématiques (partie 5)

 

9. Colorisation ?

 

  Depuis les origines du Cinéma, les moyens techniques d’impression (lithographie puis procédé offset dès les années 1950 en France) permirent l’impression d’affiches en couleurs. Tout le paradoxe consista donc pendant près d’un demi siècle à ce que l’affichiste fasse en couleur la promotion de films en noir et blanc, rompant ainsi à contrario l’une des règles d’or actuelle qui veuille que l’on ne puisse plus faire la promotion en noir et blanc d’un film en couleurs… sans laisser croire aux spectateurs que le film vanté est bel et bien lui aussi en noir et blanc !

 

  
 Les films récemment offerts dans les salles de cinéma en noir et blanc sont certes rares mais ils ont toujours existé : 
L’enfant sauvage (F. Truffaut - 1970), Le dernier combat (L. Besson - 1983), La liste de Schindler (S. Spielberg - 1993), La Haine (M. Kassovitz - 1995), Angel-A (L. Besson - 2005), Sin City (R.Rodriguez/F.Miller - 2005), Renaissance (C. Volckman - 2006) ou Persépolis (M. Satrapi/V. Paronnaud) en sont quelques exemples. Pour chacun de ses derniers, le choix des studios s’est naturellement porté sur un visuel en adéquation avec le contenu (souvent engagé) du propos du réalisateur.

 


 
  Dans le cas du
Dernier Combat, le design coréalisé par Pascal Guichard, Arno et Patrick Camboulive (photographe de plateau de Luc Besson) traduit la déchirure issue de la  lutte perpétuelle entre le Bien et le Mal, le titre lui-même dévoilant le côté négatif du conflit. Très souvent, la colorisation de l’affiche tire vers le sépia ou offre une touche de couleur en contrepoint du noir et du blanc : il demeure dans tous les cas relativement difficile pour le film de ne pas être catalogué comme appartenant aux genres policier ou fantastique, souvent connotés par un jeu d’associations de couleurs froides.

 
  Ainsi, les designs des affiches de films Fantastiques ou de thrillers tels que
Le cercle rouge (J.P. Melville - 1970), Le Parrain (F.F. Coppola - 1972),  Elephant Man (D. Lynch - 1980 ; film également en noir et blanc), Blow Out (B. De Palma - 1981), Blair Witch Project (D. Myrick - 1994), Scream (W. craven - 1996) Noces Funèbres
(T. Burton - 2005) sont toutes fondées sur ce jeu triangulaire entre le noir/bleu (nuit, mystère, peur), le blanc (surnaturel, mort) et le rouge (sang, passions diverses).

 

  On s’étonnera finalement plus de trouver des affiches en noir et blanc pour d’autres genres cinématographiques, tels que le biopic consacré à Ray Charles (Ray - T. Hackford - 2004) dont l’affiche fait ouvertement référence à celle de l’univers jazzy de Bird (C. Eastwood - 1988), ou plus simplement de voir surgir, comme dit plus haut, des designs en noir et blanc pour des films en couleurs dans des genres divers. Quelques exemples récents avec le remake du polar Get Carter (M. Hodges - 1971 et S.T. Kay - 2000), le western The Missing (R. Howard - 2003) ou la pré-affiche du biopic musical Walk the line (J. Mangold - 2005), qui revendiquent chacun la part sombre du destin de leurs différents personnages...

 

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5 avril 2008 6 05 /04 /avril /2008 15:40

Chapitre 8 - Lecture d'affiches thématiques (partie 4)


 

8. Le dernier mot...

 

Une bonne idée peut-elle se résumer à un seul mot sur un affiche de film ? Tous les concepteurs (studios ou affichistes) se sont un jour posés la question : comment rendre compte de la qualité d’un long métrage par le biais d’un seul mot, visuel, logo ou accroche ? La chose est rendue parfois plus évidente lorsque le titre du film lui-même est soit assez court (Titanic, Z, Scream, E.T., etc.) ou par avance très connu (Batman, Mulan, Shoah, etc.).

La mode des préaffiches et la technique marketing du buzz (bruit volontairement fait autour d’un nouveau produit) incite aussi les publicitaires à réfléchir sur une pré-campagne favorisant le mystère et l’attente, que dévoilera (en partie ?) ensuite l’affiche finale officielle.



  Les posters teasers de
Fanfan la tulipe (G.Krawczyk - 2003) ou des différents épisodes de Taxi (Taxi 4 - G.Krawczyk - 2007) sont ainsi faits par la société de production de Luc Besson (Europa Corp), en reprenant la mode américaine d’un visuel fort, décliné tout au long de la saga en court.

 

Le point d’interrogation posé par l’arrivée de Batman Forever en 1995 est un contre exemple, puisque les fans se posaient justement la question de l’intérêt d’un nouveau film placé sous l’égide d’un autre réalisateur que le prestigieux Tim Burton : annoncé pour le 16 Juin, le film se vendait toutefois sur la présence d’un adversaire du héros nommé E-nigma (l’homme mystère). En 2006, la ressortie de Superman (B. Singer) s’appuya sur une déclinaison d’un visuel justement mis en place en 1989 pour le premier Batman de T. Burton, et déjà positionné par Bryan Singer en 2003 sur le second opus des X-Men.

En France, se sont particulièrement les films de cape et d’épée qui aiment à décliner un logo titre simple orné d’un fleuret, ceci depuis le triomphe du Cyrano de Bergerac de J.P. Rappeneau en 1990. Mais comme on le voit, une affiche de film n’est jamais vendue uniquement sur un mot mais bien plutôt un visuel ou un mise en image du mot-phare de la promotion ; on se dirige alors vers un logo titre ou un visuel appuyé par la date de sortie du film. Il demeure rare que, dans le cas d’un nouveau produit, donc non reconnaissable immédiatement du grand public, le visuel soit totalement dénué du titre du long métrage  à venir. C’est le cas du mystérieux Cloverfield en 2008, production de JJ. Abrams qui mise sur les multiples interrogations posées par un visuel choc où l’on ne sait guère le sujet du film (attaque terroriste, catastrophe naturelle, film de science fiction, etc.).

 

 

  Approche quasi identique menée en France en 2004 pour la sortie de l’adaptation de la série de bande dessinée Blueberry par Jan Kounen (Blueberry, l’expérience secrète) avec un premier visuel accentuant uniquement un univers western chamanique, et un second dévoilant ensuite le casting principal, héros en tête. Les deux visuels se conjugueront pour donner au final l’affiche officielle, qui complétera le titre des termes « l’expérience secrète », non présents sur les deux affiches teasers.

 


 
  Un dernier exemple récent également marquant fut en 2005 le lancement de la campagne promotionnelle du très attendu
King Kong de Peter Jackson. Différents visuels (créés par la studio The Ant Farm, également à l’origine des visuels de la saga Shrek), rendirent successivement hommage au film homonyme de 1933, puis firent évoluer le visage de King Kong, en accord avec la vision du réalisateur, entre les mois d’Avril et Novembre 2005 (accentuation visible de l’intelligence farouche du singe géant, de ses cicatrices et de son aspect au rendu plus réaliste : visuel final ci-dessous à l’extrême droite).

  

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5 avril 2008 6 05 /04 /avril /2008 15:26

Chapitre 8 - Lecture d'affiches thématiques (partie 3)

 

5. A la lettre : des affiches pages d’écriture

 

  L’affiche est le lieu de tous les graphismes : illustrations, dessins, photographies, peintures, images de synthèses mais aussi lettrages, typographies et traces écrites manuelles diverses. On pourrait craindre un télescopage dû à la trop grande présence du texte, entre le « visuel » choisi à proprement parler et les indispensables titre, accroche, mentions de responsabilités et noms des studios : il n’en est rien le plus souvent, grâce à des choix esthétiques salvateurs.




  Quelques exemples, tout d’abord, qui laissent encore une part à l’image : pour
The Cooler (Lady Chance en VF, de W. Kramer - 2004), le monde des casinos se traduit sur l’affiche par un titre en néon qui laisse toutefois une petite place à l’acteur clé du film, William H. Macy.

Réduit à sa plus simple expression, l’affiche se limite à une lettre ou un chiffre, quelque part entre logo titre, affiche illustrative de l’accroche et  affiche symbole-objet de marketing (voir chapitre 5). On citera ici l’affiche teaser de l’Arme fatale 4 (R. Donner - 1998) ou du Masque de Zorro (M. Campbell - 1998).

  Rarissimes avant 1997, exceptées sur quelques affiches teasers, les affiches « textuelles » se multiplièrent par la suite, autour d’accroches fortes ou de films à thèmes porteurs (comédies ou études sociales). L’exemple type est l’une des préaffiche de Trainspotting (D. Boyle - 1996). Une variante intéressante surgit dès 1999 avec le faux avis de recherche du Projet Blair Witch (D. Myrick)  qui n’est pas sans rappeler le faux avis du Fugitif (A. Davis) en 1993. (idée reprise encore par Harry Potter et le Prisonnier d’Azkaban en 2004 (A. Cuaron)). En 2000, Summer of Sam de Spike Lee s’illustre par des vraies pages du journal Daily News de 1977 évoquant l’insaisissable serial killer du titre.

 

  En 2006, les dérives des politiques, des médias et du show business  se retrouvent à l’affiche de American Dreamz (P. Weitz). On appréciera également les fausses affiches de consignes de sécurité pour Des serpents dans l’avion (D. R. Ellis) et  de prévention du tabagisme du cynique Thank You For Smoking (J. Reitman).



  6. Vague en vogue

 

 

  
  Le succès sans précédent de
Titanic (J. Cameron - 1998) attira l’attention sur son marketing, réalisé par BLT & Associates et Bernis Balkind. Si l’affiche officielle finalisée, très classique mais harmonieuse et en parfaite adéquation esthétique avec l’histoire sentimentale tragique du film (on aura souvent entendu l’expression « Roméo et Juliette sur un bateau... ») est devenue une affiche culte,  peu de monde se souvient par contre de la préaffiche, qui ne montrait qu’un titre incliné : le nom Titanic, sur les parois rivetées du paquebot en train de sombrer, avec l’accroche parlante « collide with destiny » (Heurt avec le Destin).

  Rarement on aura vu première affiche plus sobre pour un film aussi spectaculaire (le plus onéreux de son époque aussi, avec 200 millions de $ de budget) : aucune scène spectaculaire, si ce n’est le naufrage suggéré, et aucun nom d’acteur phare. A comparer aussi avec l’affiche du Naufrage du Poséidon (R. Neame - 1972), largement plus démonstrative.

 



 

   Par la suite, et au-delà du genre « film catastrophe », plusieurs designs vont s’inspirer de ce travail. Entre temps sortira le film
En pleine tempête de Wofgang Petersen en 2000 dont le visuel impressionnant créé par Intralic Film Graphic n’hésitera pas cette fois à reprendre la scène clé de la vague tueuse géante. Petersen reprendra clairement le visuel de Titanic pour son remake du Poséidon en 2006, en poussant le concept (de Art Machine Digital) jusqu’au bout de la logique narrative avec un titre totalement inversé, comme le navire du film. Un second concept finalisé renversera le titre cette fois ci de manière plus lisible de gauche à droite, sur ce qui deviendra l’affiche officielle (à noter : le jeu de mot entre la date de sortie et le signal de détresse international « mayday »).Le visuel du récent Coast Guards (A. Davis - 2006) reproduit quant à lui celui d’En pleine tempête ,en surenchérissant dans le drame spectaculaire.

 

  7. Galeries des places

 

  La plupart des films français ou américains à gros budgets distribués dans les années 1950, 1960 et 1970 étaient basés sur un casting d’acteurs relativement importants, en parallèle avec l’âge d’or de genres à grand spectacle tels que le Film de Guerre, le Film Historique, le Film Catastrophe ou le Film de Science fiction. De nombreuses affiches de films sont similaires : une scène phare du film, complétée d’un titre choc et d’une galerie de photos portraits. Le design de John Berkey pour la Tour Infernale (J. Guillermin - 1974) est à ce titre assez éloquent, tout comme celui du Naufrage du Poséidon présenté en page précédente. Au-delà du statut même de l’acteur ou de l’actrice portraitisé(e) , c’est une thématique du film qui est déclinée, à travers lui ou elle : amour, drame, honneur, amitié, mal, héroïsme ou encore lâcheté… Le spectateur est bien sur convié à être intimement mêlé à l’action du film, au milieu d’une foule de stars... censées être anonymes et jouer monsieur ou madame-tout-le-monde  (ou les passagers d’un avion comme dans Airport (G.Seaton - 1970) !

 

   Style d’affiche très présent dans les années 1950 et 1960, autour des grandes productions notamment historiques (péplums ou films épiques comme
Spartacus (S. Kubrick - 1960) ou d’aventures (Vingt mille lieues sous les mers - R. Fleischer - 1954), le concept semble naitre vers la fin des années 1940, lorsque la tradition du dessin artistique mettant en scène le couple glamour s’estompe, au profit d’un composite entre titrage, couple vedette et scènes d’actions ou extraites du film plus présentes.

C’est cette mise en abyme du spectacle « cinéma » qui est justement à l’affiche de Sous le plus grand chapiteau du monde (C.B DeMille - 1952), où les artistes du cirque sont aussi celles du spectacle filmé, au sein d’une affiche faites « à la manière » d’une affiche publicitaire pour un cirque bien réel. Parallèlement, l’époque fut marquée par la diminution du nombre d’affiches produites (3000 en moyenne aujourd’hui pour le format 120x160 cm), alors que la mode actuelle est de promouvoir chaque personnage du film sur une affiche individualisée.

 

 

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5 avril 2008 6 05 /04 /avril /2008 15:18

 Chapitre 8 - Lecture d'affiches thématiques (partie 2)


  3. En quête du policier...

 

Autre genre majeur ayant évolué parallèlement à l’histoire du Cinéma : le Policier. Autrefois quasi littéraire, puisque adaptation ou scénario réalisés par de grands noms du roman noir (qu’ils soient francophones ou anglo-saxons), il est aujourd’hui scindé en plusieurs sous-genres distincts : néo polar engagé, film d’espionnage, thriller, comédie policière, etc.

Nous nous attarderons ici sur deux affiches atypiques : celle du Mystère de la Chambre Jaune (D. Podalydes - 2003) et celle de Mystic River (C. Eastwood - 2003).


 
 
   Première évidence : ces deux affiches se veulent chacune une énigme en soi ; car, au-delà de leur apparente simplicité, l’oeil du spectateur est immédiatement stoppé et en proie à une rapide interrogation : que cache donc la mystérieuse chambre jaune et qui sont ces ombres noires ? Pour deux univers et deux histoires bien différentes, le
design devient l’élément moteur de la future enquête policière : pour le spectateur, il n’y aura dès lors qu’une seule expectative : en allant voir le film, enfin savoir !

Chaque affiche, par conséquent, est à la fois un jeu de piste et un faisceau d’indices : tout est dans le détail et la complicité avec le lecteur-spectateur de l’oeuvre de Gaston Leroux (datant de 1907) dans le premier cas, avec l’amateur de thriller dans le second. Prenons l’affiche de la Chambre Jaune et comparons là encore avec celle de Mystic River : jaune et bleu dominent leur sujet (couleur de la chambre et couvertures de la série Le Masque ; couleur de la nuit glauque et de cette « rivière ») mais c’est bien le noir inquiétant qui attire l’œil, ainsi que le rouge sang du crime. La police du titre est judicieusement choisie pour nous offrir un  myst-ère (mystère et mystic) somme toute très opaque : les noms des acteurs sont réunis en haut des affiches, et l’on se doute que s’y trouve LE coupable, mais tout est noyé dans un fausse clarté pour la Chambre Jaune, et dans une obscurité bien présente pour Mystic River. Rappelons que la police d’écriture du titre et des inscriptions du Mystère renvoie directement aux titres des albums d’Hergé (Aventures de Tintin) et de Jacobs (Aventures de Blake et Mortimer) auxquels le film de Podalydes rend un bel hommage, entre Ligne Claire esthétisante et Murder Party typiquement anglaise. Ce jeu de silhouette et de profilage donne au spectateur une ambiance caractéristique, affirmée par la disparition des corps comme des visages : aucun acteur vedette ne vient ici « vendre » le film à outrance en gros plan. Cet anonymat des stars est dans une certaine mesure relatif puisque les silhouettes de l’affiche de Mystic River demeurent par exemple reconnaissables du cinéphile averti (dans l’ordre : Kevin Bacon, Tim Robbins et Sean Penn), dans le respect hiérarchique des noms cités et de l’importance des rôles de chacun dans le film. Il en va de même pour le Mystère de la chambre Jaune. Nous ne dirons jamais assez combien cette démarche d’effacement de la part des acteurs est rare, combien il est rare aussi, de voir le nom du réalisateur écrit en minuscule…




 
  L’accroche de chaque film se veut relativement neutre : elle est un rajout quasi inutile sur l’affiche française de
Mystic River  mais s’effacera comme aux États-unis derrière une seconde version de l’affiche comportant des critiques presse certes flatteuses mais venant littéralement ruiner à la fois la beauté plastique et la sobriété originelles du travail publicitaire, et l’interactivité induite avec le spectateur curieux et féru de policier. Pour le Mystère de la Chambre jaune, l’enchaînement « Qui est coupable ? Rouletabille mène l’enquête... » donnait ainsi une piste non négligeable, autour de la personnalité profonde du héros. Le studio Iceberg, chargé de l’affiche, a également préféré mettre en valeur l’aspect choral du film, résultante d’une équipe, et basé sur un classique se devant d’être nommé clairement (« d’après l’oeuvre de Gaston Leroux »).

 


  Deux affaires policières mais point de policiers, de crimes, d’armes ni de scènes spectaculaires ; bref, une grande sobriété pour un parti pris esthétique bien plus payant et parlant qu’une surenchère devenue aussi inutile que finalement « muette », perdue qu’elle serait au milieu de dizaines d’autres visuels identiques. A méditer !

 


4. Une expérience graphique

 

  Comment innover dans l’affiche de film ? Que montrer pour résumer le film, illustrer un thème, vendre les scènes d’action ou magnifier les acteurs ? La réponse n’est jamais simple, et certaines affiches actuelles illustrent une forte tendance à s’extirper du « simple » créneau visuel des affiches de film. Elles re-deviennent  alors réclame, tract, placard, affiche de propagande ou affiche de publicité… D’autres encore se transforment : affiche électorale ou affiche de spectacle, mais aussi autre domaine illustré comme un tableau, une couverture de livre ou un canevas ! Cette tendance, il y a peu encore réservée plutôt aux préaffiches teasers, a désormais place dans les affiches finalisées, afin de se distinguer d’une concurrence toujours plus accrue. Entre hommage et création de faux logos, ces expérimentations esthétiques sont aussi de véritables avancées.

 
   Prenons l’exemple à la fois révélateur et corrosif du dernier film réalisé conjointement par Quentin Tarantino et Robert Rodriguez :
Grindhouse (2007). Chacun des deux hommes réalisent un film de soixante minutes (Death Proof pour Tarantino et Planet Terror pour Rodriguez) en hommage aux classiques des séries B et Z (films d’horreur ou fantastico-gore réalisés sans moyens) des années 1970. Relayé très tôt par une campagne d’affichage provocante, Grindhouse créé l’évènement : par une première affiche «non approuvée par le MPAA (Motion Picture Association of America ; voir chapitre 1 et 2) » et « non visible dans les cinémas)» selon la production qui proteste ouvertement contre la censure probable d’un film à la violence exacerbée mais volontairement kitsch, et avant même que le comité américain est donné un quelconque avis sur la moralité du long métrage !

   

  
  L’expression
Grindhouse désigne aux États-unis  les petites salles de cinéma de quartier construites dans les années 1930 ou 1940, et devenues par la suite dans les années 1960 et 1970 des lieux de diffusion à bas prix de films d’exploitations divers ( sous genres, séries B ou Z, films d’horreur ou films érotiques), souvent projetés par paire. Par la suite, fin 2006 et début janvier 2007, la promotion de Grindhouse généra de nouvelles affiches embrassant la palette de style vintage des années 1970 : typographies seventies, bords abîmés, plis et traces de scotch, couleurs flashies d’époque. Une place est même laissée pour dire que le film sera diffusé dans un drive-in à la date de sortie prévue (avril 2007)… Robert Rodriguez s’est lui-même expliqué fin 2006 (dans la revue Entertainment Weekly) sur deux des trois affiches créées (voir ci-dessous) :



 
· « L’arme illustre le film de zombie de R. Rodriguez, où Rose McGowan incarne une stripteaseuse amputée et équipée d’une fausse jambe ; l’aspect vieilli de l’affiche a été obtenu avec le moyen raffiné… de la traîner sur le sol de tout un parking ! .»

 

· « L’aiguille, où l’actrice Mary Shelton tient une inquiétante seringue hypodermique, n’a pas donné lieu à explications mais a parfaitement sa place dans l’esprit marketing vintage de Grindhouse…»

 

· « Le véhicule est un slasher movie (film d’horreur contenant un tueur en série) avec une voiture à la place du couteau ; Kurt Russell y incarne un cascadeur psychopathe et l’affiche est un faux écran, induisant un univers alternatif. » 

 

 


  La mode façon vintage n’est évidemment pas l’apanage du dernier film de Tarantino (l’ombre emblématique du design de Pulp Fiction en 1994 hante cependant encore nos mémoires...): dernièrement, les affiches créés pour V pour Vendetta (J Mc Teigue - 2005 ; voir aussi chapitre 7 à ce sujet) et surtout l’affiche teaser de Walk the Line (J. Mangold - 2005), signée conjointement par l’agence Studio Number One et le graphiste contemporain Shepard Fairey. L’affiche de l’histoire du légendaire chanteur de country Johnny Cash est parfaitement rendue dans une économie de moyen par une imitation du style estampe sur bois, que l’on retrouve aussi dans les panneaux sur bois des bars country typiques. L’hommage graphique peut également être plus discret et remonter plus loin dans le temps, en accord avec la période dans laquelle se déroule le film : les années 1950 pour Loin du Paradis (T. Haynes - 2003) ou les années 1940 pour The Good German (S. Soderbergh - 2007), dont l’affiche du studio BLT & Associates est un détournement volontaire du classique Casablanca (M. Curtiz - 1942) en même temps qu’une ode au genre Film Noir tout entier. On se souviendra, enfin, de diverses affiches hommages aux serials de Science Fiction des années 1930-1950 comme celles du Mars Attacks de Tim Burton en 1996 ou de Capitaine Sky et le monde de demain (K. Conran - 2005).



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5 avril 2008 6 05 /04 /avril /2008 14:29

Chapitre 8

 Lecture d'affiches thématiques

Sommaire :

·
 1. Une certaine image de l'enfance
 

· 2. De nouvelles peintures de guerres

· 3. En quête du Policier...

· 4. Une expérience graphique

· 5. A la page : des affiches pages d'écriture

· 6. Vagues en vogue

·
 7. Galerie des places

·
 8. Le dernier mot...

·
 9. Colorisation ?

...

La notion de lecture d’affiche est liée à celle de la lecture de l’image : il s’agit de comprendre la valeur idéologique et mythologique comprise dans cet objet de signification qu'est l’affiche de film. Quels sont l’ensemble des signes ou signaux qui peuvent concourir à donner au spectateur une conception particulière et globale à la fois du produit vanté ?

Cette thématique parcourt l’ensemble des chapitres de la présence étude de ce blog, mais il a semblé important, à travers quelques exemples, de voir comment ce décryptage d’images pouvait être re-construit par le sujet analysant, entre dénotation et connotation. Sans proposer un pourtant nécessaire parcours rigoureux d’analyse sémiologique et surtout sémiotique, on conviendra d’une approche en étapes logiques : analyse du cadre, de la composition, de l’esthétique et des couleurs, de l’échelle des plans et des référents éventuels. Voici un choix de thématiques actuelles...

 


  1. Une certaine image de l’enfance


  Si l’on compare certaines affiches de productions récentes ayant « montré » l’enfance au cinéma, comme
  Les Choristes (C. Barratier - 2004) ou Oliver Twist (R. Polanski - 2005) on constatera immédiatement le grand écart lié aux histoires de chaque film : d’un côté une histoire de groupe tendant vers le conte social, s’appuyant sur des acteurs connus pour un histoire originale, de l’autre un héros solitaire issu de la littérature classique anglo-saxonne, mais incarné par un inconnu au sein d’un drame social historique. Des points communs cependant : dans les deux univers, l’innocence et la comédie semblent affronter la réalité du quotidien et la sévérité du monde adulte.

 


  On sait que le scénario des
Choristes fut une réécriture du film La cage aux rossignols de Jean Dréville en 1945, avec l’acteur Noël-Noël en tête d’affiche. La création graphique originelle, lyrique et poétique, se retrouve en partie dans l’affiche contemporaine, au coté humoristique plus appuyé derrière une nostalgie faussement « bonne enfant ». Il est frappant de voir l’évolution entre la première affiche des Choristes, focalisée sur Gérard Jugnot et avec une accroche longuement explicative, et l’affiche définitive, beaucoup plus travaillée et recentrée sur le sujet du film : les enfants. Surtout, cette seconde version nous donne quantités d’informations : une époque
(l’année 1948-1949, indication donnée par l’ardoise inversée), un lieu (un internat au nom significatif, le « Fond de l’Étang »), une situation de crise potentielle entre enfants et adultes et un moyen de remédiation (la musique). Tout ceci est résumé par la photo de classe à l’ancienne dont le spectateur est à la fois le complice amusé, l’ancien écolier et… le photographe même, puisque certains détails restent à « accorder » comme l’attention des enfants ou la position de l’ardoise au premier plan. Le titre du film est adroitement fondu dans ce faux paysage. La foi est de mise puisque c’est en traçant une croix entre les adultes que l’on découvrira le vrai héros du film : Pierre Morhange. Ceci nous permettra de dire que la photo de classe disparaît déjà au profit de la composition de la chorale, véritable lumière et source d’inspiration nouvelle au cœur des ténèbres de cet internat de rééducation, comme en témoigne la lumière de l ‘arrière plan.

 

Les affiches d’Oliver Twist témoignent de trois réalités complémentaires : un spectacle issu de la Littérature jeunesse classique (préaffiche, avec ses ombres chinoises qui évoquent aussi Pinocchio), une fresque historique (proximité cette fois ci avec le Gavroche des Misérables) et un conte socialisant (quelque part entre Le Petit Poucet et Tom Sawyer). Le contexte londonien est décrit assez différemment également : inexistant sur la pré affiche si ce n’est de par le titre du film, il devient par la suite nocturne et menaçant avec un étrange côté vénitien qui s’avère toutefois synchrone avec la noirceur des codes dickensiens. Enfin montré en plein jour, il n’est pourtant à nouveau qu’un décor flou et fuyant peu chaleureux pour l’enfant qui y chercherait refuge et chaleur : les pavés comme les eaux noires de l’affiche précédente n’ont rien d’apaisants, et contextualisent tour à tour discrètement tout un univers d’images sordides lié au Roman social du 19ème siècle, entre ombre et lumière. Inspirée graphiquement de l’affiche de Hope and Glory (J. Boorman - 1986), celle d’Oliver Twist en restitue aussi l’espoir d’un monde meilleur, finalité de cette fuite en avant d’une enfance perdue.

 


  2. De nouvelles peintures de guerre?

 


  Valeurs clés hollywoodiennes par excellence, les notions de patriotisme, de courage et de fierté se retrouvèrent naturellement à l’affiche de films réalisés par des studios réellement impliqués dans les différents conflits du 20ème siècle. Qu’ils soient fictionnels ou documentaires, critiques ou propagandistes, édulcorés ou réalistes, les regards jetés sur la guerre au cinéma auront pu assez difficilement se passer de toute une imagerie martiale que l’on qualifiera de « loi du genre » : drapeaux et uniformes, armes et champs de bataille, héros de guerre et soldats inconnus. Quelques
affiches récentes sont toutefois arrivées à contourner ces contraintes visuelles, notamment en tentant une approche pédagogique…

 Ainsi, sur le seul thème de la Seconde Guerre Mondiale, comparons les affiches des productions les plus récentes : Il faut sauver le soldat Ryan (S. Spielberg - 1998), La Ligne Rouge (T. Mallick - 1998), Stalingrad (J.J. Annaud - 2001), Pearl Harbor (M. Bay - 2001),  Windtalkers, les messagers du vent (J. Woo - 2002) et Mémoires de nos Pères (Cl. Eastwood - 2006).

 

 
  Première constatation d’ensemble : une certaine unité entre ces différentes productions : visages marqués, jeu des silhouettes, arrière plan de nuages ou fumées menaçantes, titres en blanc et couleurs terreuses. Le drapeau américain est quasi inexistant, de même que tout vaste champ de bataille. L’agence américaine
BLT & Associates signe les designs du Soldat Ryan, de La Ligne rouge et de Stalingrad, ce qui peut expliquer une approche voisine. Le marketing de Windtalkers est dû à l’agence Diane Reynolds-Nash (signataire des campagnes James Bond de 1997 à 2002), celui de Pearl Harbor à Bernis Balkind  (marketing de Alien, Forrest Gump ou Sixième Sens) tandis que celui de Mémoires de nos pères est créé par The Cimarron Group (auquel on doit aussi, entre autres, les campagnes d’affichage de Terminator 2, Gladiator, Troy  ou Superman Returns). Le regard actuel sur le genre classique qu’était le « film de guerre » joue à l’évidence sur un double rapport : rappel des films et affiches traditionnelle d’une part (voir page suivante quelques exemples) et volonté pédagogique de l’autre. C’est ce regard éducatif qui fait toute la différence entre une affiche de propagande et une affiche de film engagé : depuis la fin des années 1970 et les films sur la Guerre du Viet-Nam essentiellement, la guerre est destructrice, sale et politiquement fasciste. Tout film récent sur le sujet est donc un drame et un plaidoyer pacifiste, ce qui n’enlève rien
à un caractère martial ou proaméricain souvent affirmé. Le jeu de regard entre acteurs et spectateurs, anciennes connivences de fait, se déroule sur un terrain balisé depuis l’apogée du genre, vers 1979, là où le film de guerre était encore prétexte au déploiement artistique, logistique et financier de quantités de stars, de scènes épiques pyrotechniques et de morts héroïques… Tout cela étant bien sur vanté dès l’affichage, souvent spectaculaire  : voir par exemple  les visuels de Le pont de la rivière Kwaï (D. Lean - 1957), Les canons de Navarone (J. Lee Thompson - 1961), Le jour le plus long (K Annakin - 1962), La grande évasion (J. Sturges - 1963), Tora ! Tora ! Tora ! (R. Fleischer - 1970), Midway (J. Smight - 1976) ou Un pont trop loin (R. Attenborough - 1977). La conception traditionnelle de l’affiche de film de genre, parfaitement traduite par l’artiste français Jean Mascii dans l’affiche de Quand les aigles attaquent (B. G. Hutton - 1969), et vendu alors comme un film d’aventure-action populaire, s’est aujourd’hui dissoute dans une approche beaucoup plus réaliste et intellectuelle du sujet, quelque part entre volonté artistique et devoir de mémoire.

 


  L’affiche comme le titre du récent
Mémoires de nos pères (2006) de Clint Eastwood table aisément sur un design qui est justement repris au cœur du film : l’évocation de l’Histoire, grande et petite, en en particulier celle de  la célèbre photographie Raisng the Flag de Joe Rosenthal (voir ci-dessous : 5 Marines et un infirmier de la Navy hissant le drapeau américain sur l’ile japonaise d’Iwo Jima le 23 Février 1945), qui inspira déjà des milliers d’illustrations et le monument réalisé en 1954 au cimetière d’Arlington en Virginie. L’affiche de film, qui est perpétuellement ce croisement entre mythe, mythologie, histoire et réalité, trouve une forme d’aboutissement quasi évident ici : résumé de l’Histoire et symbole mondial, elle Est le film, en une forme d’absolu visuel.

 

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2 avril 2008 3 02 /04 /avril /2008 18:28

  

  En avril 1968, lors de la sortie du film de Franklin J. Schaffner, la mode concernant l’affichage publicitaire est encore relativement concentrée sur 3 messages simples : le nom et le visage des principaux acteurs, un titre de plus en plus décliné en logo-titre (notamment lorsqu’il s’agit d’un film de genre) et un assemblage composite et dessiné des grandes scènes chocs du film. Enormément de studios font encore appel à des dessinateurs reconnus, mais il faudra attendre des artistes de la trempe de Saul Bass (design des affiches des oeuvres d’Otto Preminger ou d’Alfred Hitchcock) ou de Robert Peak (design des affiches d’Apocalypse Now, de Superman, Star Trek, Excalibur) pour que des créateurs véritables s’imposent sur la durée…

 

  

   L’affiche originelle
de la Planète des singes (déclinée en 5 visuels) met en avant essentiellement le mystère et le concept d’univers aliénant (« man…hunted…caged… ») issus du roman de P. Boulle.

  Une longue accroche résume l’intrigue du film. On y distingue le logo-titrage Planet of the Apes, création du typographe et logo-designer américain Edward Benguiat, qui sera reprise sur tous les films suivants, y compris le remake de Tim Burton en 2001.

 

 

    

 

 Parallèlement, le message critique du film de Schaffner est évoqué par un visuel pré-promotionnel (one sheet ou pré-affiche) qui détourne malicieusement la célèbre affiche gouvernementale au profit du recrutement (créée en 1917 par le peintre J.M. Flagg)…

 


 

 

     

Pour la promotion internationale, et suite à l’affiche de la première mondiale (ci-dessus, avec la ligne d’accroche « Somewhere in the universe there must be something better than man. »), la 20th Century Fox confie à des artistes locaux le soin de réaliser sur chaque continent des visuels en adéquation avec chaque culture. L’histoire ne retiendra presque aucun nom de ces créateurs anonymes qui œuvraient dans l’ombre des majors (on ignore encore par exemple le nom de l’artiste qui imagina le logo titre du film Le Parrain…).




 

 

En France apparaît ainsi une affiche qui lorgne autant du côté du serial d’aventure, du film fantastique que de la science-fiction. Le logo-titre n’est pas repris tel quel et l’interdiction aux moins de 13 ans y est à peine décelable (coin inférieur gauche)… C’est l’affichiste français Jean Mascii (sa signature apparait en haut à droite) qui réalise ici un travail semi photo-réaliste pour l’avant-plan avec Charlon Heston, au mépris d’un arrière plan plus confus où plusieurs scènes du film semblent se heurter. En comparant cette affiche avec la production de l’époque, on y re découvre des influences visuelles diverses : animalité et monstruosité opposées au monde scientifique humain (La machine à remonter le temps - G. Pal - 1960), paysages extra-terrestres (mais aux aspects terriens…) inconnus, désolés ou dévastés et ciels menaçants (2001, l’odyssée de l’espace - S. Kubrick - 1968), destruction de la race humaine (Le jour où la Terre s’arrêta - R. Wise - 1951 ; Le choc des mondes - R. Maté - 1951) et probable guerre des mondes.

  

 

 

 

 

 

  De même, d’autres genres cinématographiques que l’anticipation semblent ici convoqués : péplum (le héros réduit en esclavage, Heston popularisé par Ben Hur), aventure (un héros au physique proche de Tarzan, western (cavaliers « indigènes » contre héros blanc), horreur (monstres), film catastrophe (fin de l’humanité) et guerre dans une moindre mesure (au moins pour cet épisode de la série). Les différentes ressorties en vidéo donneront lieu par la suite à des relectures réactualisées et plus ou moins habiles du visuel principal.

 

  On retiendra enfin - et pour l’anecdote - de cette première campagne promotionnelle, qu’elle n’oublia pas l’aspect pédagogique puisqu’une affiche spécifique et une plaquette en deux volets furent éditées au profit des enseignants et étudiants désireux de comprendre… le comportement de l’homme !

 

  

  
 

 

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31 mars 2008 1 31 /03 /mars /2008 21:49

   Né en 1948 dans le Massachussetts, John Alvin, l'un des affichistes américains les plus talentueux et respectés du 20ème siècle, est disparu le 6 Février 2008, à l'âge de 60 ans.

 
  Promu en 1974 du
Art Center College of Design (situé à Pasadena en Californie), et tandis que d’autres se tournent vers l'illustration pour la presse, lui, en fan de cinéma, se lance dans l'illustration pour Hollywood.

   Sa première affiche est pour la comédie de Mel Brooks Le Shérif est en prison (Blazing Saddles, 1974). Une longue et fructueuse collaboration entre les deux hommes est entamée, qui nous donnera les affiches de Frankenstein Junior (1974), La Folle Histoire du monde (1981) et La Folle Histoire de l'espace (1987), pour une série d'affiches possédant indubitablement la patte Alvin.

  Mais c'est sans aucun doute pour sa deuxième réalisation que John Alvin entrera dans la légende. Il conçoit en effet une des affiches les plus emblématiques du cinéma de Science Fiction, qui restera vingt-cinq ans plus tard sa plus grande fierté : Blade Runner de Ridley Scott (1982). Ils collaborent de nouveau sur Legend en 1985.

 

 
  Autre cinéaste avec qui
John Alvin collaborera plus d'une fois : Steven Spielberg. La mythique affiche de E.T (1982), celle de L'Empire du Soleil (1987), mais aussi la magnifique affiche de La Couleur Pourpre (1985), celle d’Always (1989) et le design de Hook (1991). Toutes ses affiches marqueront les spectateurs de l'époque, attirés par la magie et le mystère insufflés à ces créations visuelles publicitaires.




































 
   Reconnaissant le talent d'Alvin, Spielberg fera très souvent appel à lui pour réaliser les affiches des films produits par sa maison de production
Amblin Entertainment : Gremlins (1984), Cocoon (1985),
Les Goonies (1985), L'Aventure intérieure (1987), Arachnophobia (1990), Les Nerfs à vif (1991), ...





 

 
  Autre collaboration prestigieuse : les affiches d'une multitude de films pour le studio
Disney (La Petite Sirène (1989), Alladin (1992),
 
Le Roi Lion (1994), La Belle et la Bête (1991), Mulan (1998), ...) dont il devient le créateur officiel des « campagnes adultes » de promotion pendant la décennie 1990.

 
  
 
  John Alvin
fut sans doute l’un des premiers à voir les possibilités nouvelles offertes par l’explosion de l’informatique, et à utiliser successivement le crayon, le pinceau, l’aérographe et la tablette graphique. Il prendra part, pendant  trente années, au lancement promotionnel de près de 120 films, préférant toujours le côté symbolique de l’affiche à la débauche de moyens graphiques. On peut citer l’ensemble de ces créations car toutes sont devenues emblématiques d’un style comme d’un genre lié à
l’entertainement, n’excluant ni le scénario ni la justesse des personnages (Rain Man (1988)). L’affiche phare d’Alvin demeure à juste titre celle d’E.T., et l’on comprend pourquoi, tant elle illustre cette magie du designer d’affiches de film, à la fois créateur artistique et... se devant divinement inspiré en dépit de la contrainte du marketing !


Deux sites (en anglais) pour revisiter l’œuvre de John Alvin :

 

 

- link (site officiel)

 - http://www.johnalvinart.com (site de fan, très complet)

 

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31 mars 2008 1 31 /03 /mars /2008 18:17

 

  J’ai toujours rêvé d’être un gangster de Samuel Benchetrit (sortie France le 26 Mars 2008) semble se nourrir d’office, dès sa phrase-titre, du fantasme enfantin des garçons d’être hors-la-loi ou voleur, sympathique et trouble mélange de Robin des Bois et d’Arsène Lupin ou alchimie idéalisée de Jesse James, d’Al Capone et de Jacques Mesrine… Selon les époques et les influences.

 Ce titre, c’est aussi une influence claire pour un film à la manière du cinéma de Martin Scorcèse (la phrase citée est le point de départ des Affranchis en 1990), de Francis Ford Coppola (pour la naissance de la violence dans un milieu populaire : Le Parrain (1972) et de Quentin Tarantino (pour les personnages décalés et les quatre histoires croisées : Reservoir Dogs (1992) ou Pulp Fiction (1994)).

 

  Difficile de passer à côté de l’affiche aux couleurs sépias : son aspect vintage, reflétant à la fois un univers Western (teintes, typographie du titre et revolver Colt) et la photographie documentaire des années 1890-1930, situe un monde teinté de violence et de déchéance, y compris et pour une fois non dans l’Homme mais chez la Femme et l’Enfant. Seins nus, le revolver passé à la ceinture, une femme masquée (Anna Mouglalis, voir plus loin) allaite son bébé dans une posture inspirée de la Vierge à l’Enfant. Entre image iconoclaste, publicité d’Oliviero Toscani pour United Colors of Benetton (voir ci dessous l’affiche Breastfeeding en Septembre 1989) et illustration pour une pochette de disque rock, l’affiche fait mouche en ce qu’elle illustre le thème du long-métrage et non l’un de ses moments (le visuel de l’affiche n’ayant aucune place au sein… du film).

  

 
   Le fait passe inaperçu (et pour cause) mais demeure rarissime : seuls le titre et les noms des acteurs sont présents sur l’affiche, dénuée par conséquent de tout pavé de responsabilité, logos ou partenaires. C’est affirmer par là l’identité et la construction quasi indépendante du film pour son réalisateur, en dépit d’un cofinancement entre trois producteurs (Fidélité films, Wild Bunch et Canal Plus).

  La question mérite d’être posée : l’affiche est-elle anarchiste, provocante ou sexiste, à l’heure où s’ouvre un débat national sur la représentation de la femme dans la publicité ? Anna Mouglalis, égérie de Channel (ici photographiée (par son mari, Samuel Benchetrit) en tant que mère allaitant son propre enfant), répond par la défensive : il s’agirait plutôt d’humanisme, de vulnérabilité, de pudeur, de valeur narrative et émotionnelle. L’affiche n’est certainement pas choquante ni à proprement parler moralement dérangeante (son affichage est du reste toléré) ; ce qui l’est plus, c’est l’inspiration reprise à la controversée affiche de théâtre du graphiste néerlandais Anton Beeke (« Sa vie, sa mort », datant de 1997, et montrant déjà un revolver et un bébé sur un même corps féminin), design encore récemment plagié - de manière indirecte - par Vanessa Beecroft et Louis Vuitton en 2006 (exposition Alphabet Concept).

 La vie, la mort, le rêve et l’image : des thèmes éternels du Cinéma, pour une fois affichés de manière franche dans un monde contemporain aseptisé mais paradoxalement toujours plus sujet à l’émotivité. Là où la violence fait débat, le film démonte la brutalité par la nudité et réaffirme la folle humanité : « J’ai ».

 

 

 

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29 mars 2008 6 29 /03 /mars /2008 14:33



 Angles d’attaque de Pete Travis (sortie France le 19 Mars 2008) est un film puzzle qui n’a rien à envier aux meilleurs œuvres de Brian de Palma en ce qui concerne la question du point de vue du spectateur, de l’angle couvert par la caméra et du choix d’images offertes à l’œil comme témoin d’une scène précise.

  En multipliant les plans autour de l’assassinat du président américain sur la Plaza Major de Salamanque en Espagne, le film se fait miroir non seulement du genre thriller politique tout entier, mais aussi de la mode des séries télévisuelles où agences gouvernementales et terroristes s’affrontent dans un temps décompté à la seconde (24 heures chrono, Alias, …). L’évocation des œuvres parallèles telles que I comme Icare (H. Verneuil - 1979),  JFK (O. Stone - 1991), Dans la ligne de mire (W. Petersen - 1993) ou Un crime dans la tête/The Manchurian Candidate (J. Frankenheimer - 1962 et J. Demme - 2004) semble également évidente.

 Dernier point de référence, le jeu sur la mise en scène, l’ouverture de l’angle spatio-temporel et un scénario retors où les destinées des personnages se croisent ou se télescopent. Que le héros remonte littéralement dans le temps, essaye de recoudre le fil d’une histoire perdue (étant amnésique par exemple), ou tente de réaliser une mission impossible (contre la montre…), l’ordre des choses est le même : le réalisateur camoufle, expose ou sur-montre, en jouant éventuellement du split -screen (écran divisé en plusieurs cadres et plusieurs actions simultanées ; voir L’affaire Thomas Crown (N. Jewison - 1968), Snakes eyes (B. de Palma - 1998), Timecode (M. Figgis - 200), Phone game (J Schumacher - 2002) ou encore la série TV 24 heures chrono (depuis 2002)). Cinéma, télévision, caméscope et œil humain cherchent la vérité dans un dédale d’images ou fiction et documentaire peuvent également brouiller les pistes…

  Le visuel de l’affiche d’Angles d’attaque est une réalisation du célèbre studio BLT & Associates (campagnes promotionnelles du Silence des agneaux, Titanic, Mission Impossible, Da Vinci Code, Sin City…) : une silhouette anonyme et armée reprend en un triple kaléidoscope, puzzle et split -screen les visages et idées fortes du film. L’accroche insiste sur le point de vue et la vérité, devant émanés du chaos et de l’inconnu.

  Si cette affiche nous en évoque d’autres, c’est parce que le cinéma contemporain occidental offre un panorama visuel du recyclage relativement important, où la silhouette façon Men in Black du représentant de l’ordre, le découpage technique et le jeu sur le montage sont désormais de mise dans le genre techno-thriller post 11 Septembre. Si le concept global du design trouve probablement son origine dans les visuels légendaires du graphiste Saul Bass (1920-1996 ; voir par exemple ci-dessous l’affiche de L’homme au  bras d’or (O. Preminger - 1955)). On évoquera ici certains posters-teasers de la série des Matrix (A. et L. Wachowski - 1999 et 2003), l’affiche d’American gangster (R. Scott - 2007) ou encore, pour la seule année 2008, les visuels "jumeaux" de Cortex (N. Boukhrief - janvier 2008) et Jumper (D. Liman - février 2008) !

  

 


  












  Evolution certaine de la représentativité du sujet, le corps se fait désormais miroir des écrans, et la lumière n’est plus sur la star mais sur l’image qu’elle renvoie d’elle, en une transparence éphémère : qu’on en juge par la différence fondamentale qui peut exister entre le design de Snake eyes (B. De Palma - 1998) et celui d’Angles d’attaque, où l’acteur, même manipulé par l’iconicité envahissante de l’arrière plan, s’en distingue du moins par un jeu de couleurs chaudes renvoyant au titre. Dans Angles d’attaque, l’anonymat est partout, chaque regard se cherche et seul le mot « attaque » en rouge sang se distingue d’un ensemble qui a déjà perdu les couleurs patriotiques emblématiques du sujet (voir le drapeau américain de JFK d’O. Stone en 1991). Est-ce par conséquent un hasard si le gros plan sur l’œil occupe la case (unique) la plus importante ? L’affiche regarde un spectateur démultiplié (Requiem for a dream - D. Aronofsky - 2000), l’interroge et pose aussi la question… comme un reflet du futur écran contemplé.








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26 mars 2008 3 26 /03 /mars /2008 07:05

    3h10 pour Yuma (J. Mangold) signe en Avril 2008 l'éternel retour du genre emblématique du cinéma américain : le Western. Avec les rares chefs d'œuvre successifs relativement récents que furent Impitoyable (C. Eastwood - 1992) et Open Range (K. Costner - 2004), le genre semblait baigner entre le ton crépusculaire et le ton aride et violent d'un docu-fiction (voir la minisérie télévisuelle Into the West (2005), non dépourvue de lyrisme). Le remake du classique Trois heures dix pour Yuma (D. Daves - 1957) ne déroge pas à cette double approche, ni à une âpre tension annoncée par le titre et que seule la fusillade finale résoudra partiellement.
   La campagne publicitaire du film de James Mangold est réalisée par le studio Ignition Print, également signataire de la campagne promotionnelle de John Rambo (S. Stallone - 2008).

 
   L'affiche américaine
de 1957 contenait en résumé le long métrage : tension imprimée par l'écoulement inéluctable du temps, train comme point de mire et échappatoire à un réel morbide et lui aussi crépusculaire, duel masculin fratricide et discrète histoire d'amour (sur une variante de l'affiche).

  

 

  L'affiche américaine teaser de 2007 est impressionnante : un poster vintage fait à l'ancienne dans une teinte terreuse et poussiéreuse unique, où un personnage anonyme doublement armé est vu de dos, attendant le fameux train de 3h10 pour Yuma...Nul ne sait s'il s'agit d'un bad boy préparant l'attaque dudit train ou du héros, seul finaliste d'un duel homérique. Le visuel évoque  le célèbre design d'Impitoyable pour la vue de dos, création de Bill Gold qui avait auparavant signée la légendaire affiche de Rien que pour vos yeux (J. Glen - 1981), dont la posture, synthèse du charme et du danger, est l'évident modèle de 3h10 pour Yuma.

 

 
 La première affiche américaine
résonne encore comme un teaser, vendant le film sur la seule idée d'une violence latente, marquée par la silhouette du gunfighter solitaire (qui n'est aucun des deux noms de la tête d'affiche) autant que par un titre tremblant et sanguinolent sur un fond blanc pacifique ou neutre. Notons que si le choix de la typographie n'est pas innocente, le « 3:10 » américain est aussi plus « impactant » que le sobre « 3h10 » français... L'accroche « Time waits for one man » complète l'idée d'un décompte macabre.


 

  La seconde affiche américaine
montre enfin le visage des opposants, armes à la main et dans une gestuelle visuelle savamment calculée puisque si ni les regards ni les balles (probables !) ne se croisent, elles contournent un titre central, enjeu scénaristique à la dramatique minutée... Le design évoque par ailleurs une carte à jouer (dans un design proche là aussi d'un James bond : voir par exemple le concept allemand du visuel de Vivre et laisser mourir (G. Hamilton - 1973)), où l'ultime coup de poker entre les deux caractères serait finalement de survivre à la diagonale mortelle de l'heure fatidique.

 tod-copie-1.jpg
  Difficile de dire réellement pourquoi le studio Ignition Print a réorienté le look général de sa campagne promotionnelle, entre l'esthétique appuyée de l'affiche teaser et le style plus commun (et moins réussi !) des affiches finales, si ce n'est le désir de vendre le film non sur son aspect western mais bien sur un titre connu et un couple de stars affirmées (qui auraient dû être Tom Cruise et Eric Bana), affiché en bigger than life dans un ensemble chromatique qui dénote à vrai dire avec l'imagerie affiliée au genre. Le Western n'a décidemment jamais fini ni de renaitre, ni de nous surprendre...

 

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  • : Décryptage d'affiche de films
  • : Les affiches de films sont des papillons de la nuit du Cinéma : multicolores, éphémères et éternelles à la fois... Invitation, trace, mémoire d'un film ou d'un genre, l'affiche en tant qu'oeuvre visuelle ne saurait être démentie, mais comment la déchiffrer, qu'en saisir et que nous dit-elle finalement, à nous, spectateurs ?
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